Listeners:
Top listeners:
Mayotte FM – 92.6 & 95.1 Mhz Des hits et de la musique mahoraise 🇾🇹
L’Hexagone n’avait donc rien compris. Début 2024, un vaste mouvement de colère porté par des collectifs citoyens bloquait Mayotte, réclamant des mesures fortes pour lutter contre l’insécurité galopante dans le département. Pour répondre aux manifestants, Emmanuel Macron avait envoyé son ministre de l’Intérieur et des Outre-mer sur place avec des annonces fortes. À peine descendu de l’avion, Gérald Darmanin annonçait ainsi la fin totale du droit du sol sur le territoire mahorais. Une première en France. L’annonce avait fait la une des médias nationaux.
Pourtant, le droit du sol n’était pas vraiment le sujet principal qui chiffonnait les Mahorais, mobilisés sur des barrages. « Toute la presse et la classe politique se sont emparées de la thématique du droit du sol. On ne parle plus que de cela », remarquait, circonspect, le professeur de droit public à l’université de Mayotte, Thomas Msaidié. Pourtant, « notre préoccupation n’est pas la même que celle des autorités centrales », ajoutait-il. « Le titre de séjour territorialisé a été relégué au second plan à Paris. »
En effet, ce que de nombreux Mahorais demandaient (et demandent toujours), c’est la fin pure et simple des titres de séjour territorialisés, cette dérogation légale qui empêche tout immigré en situation régulière à Mayotte de se rendre ailleurs sur le territoire national. Or, depuis, Gérald Darmanin a quitté la Place Beauvau et le droit du sol a simplement été durci au lieu d’être complètement supprimé. La fin des visas territorialisés, elle, a complètement disparu de l’agenda gouvernemental. L’actuel ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau ne voulait d’ailleurs pas en entendre parler.
Finalement, les parlementaires ont pris les devants. Mardi 24 juin, lors de l’examen du projet de loi pour la refondation de Mayotte en séance publique à l’Assemblée nationale, les députés ont validé l’article prévoyant la suppression des titres de séjour territorialisés en 2030. Un vote tendu, incertain jusqu’à la dernière minute. Mais un revirement majeur, salué par les élus de Mayotte.
Cet article a été rajouté par surprise il y a près de deux semaines par le député de droite Philippe Gosselin (Les Républicains, LR), un des rapporteurs du texte. Pourtant, une telle disposition avait été largement rejetée par les sénateurs (où la droite républicaine est majoritaire) lors de l’examen de la loi Mayotte au mois de mai, et aussi par le président de LR, Bruno Retailleau.
En séance, mardi après-midi, l’élu, soutenu par trois autres rapporteurs – Estelle Youssouffa (LIOT), Agnès Firmin Le Bodo (Horizons) et Philippe Vigier (MoDem) – s’est ainsi justifié : « La territorialisation des titres est vide d’effets positifs », a-t-il jugé, rappelant que sa suppression est « une demande forte de la population ». « L’île est au bord de l’explosion », a pour sa part prévenu la députée mahoraise Estelle Youssouffa, grande défenseure de cette mesure qui a envenimé les débats.
L’examen de cette disposition a révélé les fractures politiques dans cet hémicycle éclaté entre la gauche, le centre et l’extrême droite. L’initiative des rapporteurs de la loi a obtenu un large soutien des groupes de gauche (communistes, insoumis, écologistes et socialistes), malgré quelques réserves du côté des députés réunionnais. Ces derniers craignent en effet qu’une fin précipitée des visas territorialisés n’entraîne un afflux d’arrivées sur leur île. « Notre département n’est qu’à deux heures d’avion de matin, a insisté la Réunionnaise Émeline K/Bidi, qui siège avec le groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR). Ces gens-là seraient susceptibles de venir à La Réunion. » C’est pourquoi elle et ses collègues réunionnais demandaient à ce que la mesure n’entre en vigueur qu’en 2030, et non dès l’année prochaine.
À l’extrême droite, l’élue de Mayotte Anchya Bamana était bien seule parmi ses collègues du Rassemblement national (RN) pour soutenir la déterritorialisation des titres de séjour. En effet, son groupe s’est largement insurgé contre cette mesure qui, selon ses membres, entrainerait un appel d’air migratoire vers l’ensemble des territoires de la République. Marine Le Pen, présidente des députés RN, a désapprouvé cette « fausse bonne idée ».
En réalité, vous allez aggraver la situation. Nous ne souhaitons pas que les clandestins restent à Mayotte. Nous voulons que les clandestins rentrent chez eux.
Marine Le Pen, présidente des députés du Rassemblement national
Face à cette opposition de l’extrême droite, Estelle Youssouffa a ciblé sa cheffe de file. « On peut faire de superbes scores à Mayotte, mais en fait ne pas écouter les revendications des Mahorais et des Mahoraises », a-t-elle lancé à Marine Le Pen. Candidate à l’élection présidentielle de 2027, cette dernière a voulu éviter de frustrer ses électeurs mahorais. Au lieu de voter « contre », elle a appelé ses troupes à s’abstenir, promettant que, quand elle sera élue présidente, elle aura réglé la question migratoire dès 2027. La déterritorialisation des titres de séjour ne posera donc plus problème en 2030, a-t-elle dit.
Enfin, au centre et à droite, l’examen de l’article a vivement divisé les parlementaires soutenant le gouvernement. Le ministre des Outre-mer Manuel Valls a finalement accepté de soutenir cette mesure transpartisane portée par Philippe Gosselin. Les Républicains, le MoDem et Horizons, avec le petit groupe LIOT, ont globalement soutenu cette fin des titres de séjour territorialisés à Mayotte en 2030.
En revanche, chez certains macronistes, la mesure a été vécue avec irritation. « Si on déterritorialise, on va affaiblir le peu d’outils qu’a le ministère de l’Intérieur pour contrôler l’immigration », a regretté Charles Sitzenstuhl (Ensemble pour la République), qui demandait la suppression de l’article. « Prévoir la fin de la territorialisation de certains titres à Mayotte ne peut être envisagé avant de réduire drastiquement les flux et de mieux réguler l’immigration, ce qui est l’objet de ce projet de loi », a-t-il défendu dans un amendement rejeté par l’Assemblée.
Finalement, après d’âpres débats, les députés ont majoritairement voté en faveur de la fin des titres de séjour territorialisés à Mayotte en 2030. Rien n’est toutefois fait. Car une fois l’examen de la loi de programmation terminé à l’Assemblée nationale, il faudra que députés et sénateurs s’entendent sur une version commune du texte en commission mixte paritaire (CMP). Or, le Sénat avait clairement dit non à la suppression de ces titres.
Écrit par: Mayottefm
15:00 - 17:00
radiomayottefm@gmail.com
ÉCOUTEZ MAYOTTE FM À SOHOA SUR 95.1 MHZ ET À MAMOUDZOU SUR 92.6 MHZ
Copyright RADIO MAYOTTE FM 1995-2025 - Association Mayotte FM - Quartier racine - 97670 SOHOA
Commentaires d’articles (0)